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Au cœur de la Mauricie, après quelques kilomètres de piste forestière, on arrive à un centre de villégiature bien particulier. Niché entre lac et montagnes, et guidé par des valeurs communautaires, Aux berges du lac Castor propose de vivre ses vacances autrement.

Comment peut-on passer de la gestion d’un café-spectacle à Saint-Élie-de-Caxton à celle d’un centre récréotouristique au milieu de nulle part? Avec de l’audace, une vision… et beaucoup de monde. «Nous étions 21 au début de cette aventure», raconte François Chalifour, un des fondateurs. «Nous voulions offrir une solution de rechange plus économique et originale aux gros complexes hôteliers de la région, notamment pour les musiciens et les gens qui assistaient à leur spectacle à notre salle La Pierre angulaire. Nous avions même commencé à couler les fondations d’une auberge non loin de là. Et puis, nous avons appris que l’ancien camp de vacances Val Heureux était en vente.»

Et là, ça a été le coup de foudre. Le site abandonné, majestueux et encore sauvage, offrait beaucoup plus de potentiel de développement que le projet initial. Planche à planche, le travail a commencé pour permettre aux premiers visiteurs de venir séjourner dans le chalet central à l’été 2000. «Tout s’est mis en place progressivement. Nous avons commencé avec l’auberge, puis rendu le chemin forestier plus praticable, passé une ligne téléphonique pour ne pas être totalement coupés du monde, et bâti un premier bloc sanitaire. Nous sommes partis de loin!», avoue François.

photo. Jean-Yves Lévesque
photo. Jean-Yves Lévesque

La belle équipe n’a effectivement pas chômé. Après l’auberge, ils ont isolé six petites huttes où on séjourne à la chandelle, rénové trois chalets, installé des yourtes, aménagé un site de camping rustique, bâti trois lofts de création artistique et ouvert un petit café-resto estival. Chaque année a réservé son lot de nouveautés, comme cette barge flottante sur le lac qui hébergera ses premiers visiteurs cet été, ou encore ces deux simples hamacs munis de moustiquaires si l’on veut s’isoler en pleine forêt.

Les valeurs qui guidaient les 21 défricheurs les ont poussés à fonder une coopérative de travailleurs pour gérer Aux berges du lac Castor. «On voulait que les membres puissent vivre de leur activité, que les décisions soient prises collectivement, que notre projet ne repose pas sur les désirs d’actionnaires ou des subventions. Notre mission, depuis le début, c’est de favoriser une mission culturelle en milieu naturel, d’offrir un lieu de rencontre et d’hébergement original et abordable et de s’ancrer dans ce magnifique environnement de manière écologique et durable.»

photo. Jean-Yves Lévesque

Du plaisir, simplement

Cette philosophie a aussi coloré les installations, les activités et la qualité d’accueil du centre, qui est aujourd’hui ouvert tout au long de l’année et mené à temps plein par 4 des 21 anciens membres fondateurs. «Ici, il n’y a pas d’étoiles à l’entrée du site ni dans l’ameublement, mais dans le cœur des gens et au-dessus de nos têtes», indique François. Alors oui, tout est vu simplement aux Berges du lac Castor. L’ameublement est rustique, les cuisines et les installations sanitaires, communes. On n’y dispose pas de salle informatique, encore moins d’ondes cellulaires. On apporte sa literie, on vit sans électricité dans plusieurs structures, on va s’approvisionner dans les petites épiceries et chez les artisans à plusieurs kilomètres de là.

Mais le jeu en vaut la chandelle lorsqu’on veut vraiment se déconnecter et vivre une expérience hors des sentiers battus. «Nous tenons à la tranquillité de l’endroit, mais nous proposons des activités en toutes saisons, explique François. L’été, des canots, des kayaks, des rabaskas et des pédalos sont mis à la disposition de nos visiteurs. Ils peuvent aussi improviser une partie de volleyball ou de pétanque, se regrouper autour d’un feu ou se balader à travers la trentaine de kilomètres de sentiers pédestres que nous avons aménagés. Ils peuvent accéder à un point de vue exceptionnel sur les Montérégiennes, observer un imposant barrage de castors, croiser une faune et une flore préservées…» L’automne, la forêt se pare de couleurs incroyables. Et l’hiver, on peut se tenir occupé en faisant du patin sur le lac, de la raquette sur les sentiers et de la glissade sur tubes. «Nous croyons fermement en cette approche. Nous organisons même, deux fois par an, des corvées pour nettoyer le site en logeant et en nourrissant gratuitement tous les volontaires qui veulent nous donner un coup de main. C’est ça, l’esprit qui habite notre centre.»

photo. Geneviève Philibert
photo. Photosmax

Musique!

La première vocation musicale et artistique de l’équipe n’a pas disparu aux Berges du lac Castor. Au contraire, pour encourager les artistes à se rendre dans cette retraite, les propriétaires ont conçu des lofts de création, équipés et insonorisés, qui ont reçu des artistes locaux comme Les Sœurs Boulay, Philippe Brach ou encore Misteur Valaire.

Le 21 juin, ainsi que deux fois au cours de l’été, le centre anime également des petits spectacles intimes. «Ça nous fait parfois vivre des moments magiques, comme quand Juan Sebastián Larobina a joué sur un rabaska sur le lac. Ou bien des histoires cocasses, comme quand un groupe de visiteurs est arrivé ici avec un camion bourré de speakers, pour organiser à notre plus grande surprise un rave qui a fait trembler les murs de toutes nos installations! Nous posons un peu plus de questions à nos hôtes depuis cette aventure», raconte en riant François.

photo. Mary Ann St-Cyr

Aux berges du lac Castor a réussi son pari un peu fou. En l’espace de 18 ans, cette coop a fait émerger au milieu de nulle part un centre qui a réuni familles, groupes d’amis, groupes scolaires, touristes et même entreprises. «Ailleurs, les gens rentrent directement dans leur chambre regarder la télévision après leur réunion ou leur repas. Mais ici, on échange, on cuisine et on mange côte à côte, on se recentre. On va s’amuser sur le lac ou dans la forêt, on va chercher ses légumes aux Potagers sauvages, acheter de la truite fumée au petit boucanier Fumés des monts, vider quelques verres au vignoble Le Cavalier du Versant, ou visiter le village de Saint-Élie-de-Caxton. On a toute la liberté et l’autonomie que l’on désire.» Une formule de vacances différente, profondément humaine et inspirante. Alors, qu’irez-vous chercher aux Berges du lac Castor? La sérénité, vos racines, la rencontre, la surprise? Peut-être tout cela à la fois.

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