Chasser pour traquer le lien perdu avec la nature

Franck Émond sillonne le Québec de Terre-Neuve à Anticosti, mais c’est dans les battures de l’île d’Orléans qu’il se rend chaque automne pour chasser et observer la nature. Pour lui, la chasse n’a que peu à voir avec le maniement d’armes. Il faut marcher longtemps, sentir sans cesse, toucher les traces pour déjouer l’intelligence de l’animal. C’est ce qu’il tente de montrer dans l’émission Hooké à la chasse, qu’il anime sur les ondes d’Unis TV.

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«Il est apparu là, à flanc de montagne, silencieusement, le soleil venait de percer…» Ce chasseur hors pair a beau arpenter la forêt depuis qu’il est en âge de marcher, la vue d’un orignal au petit matin dans la réserve faunique des Laurentides le laisse toujours le souffle court et les yeux écarquillés. Pour connaître la nature sous ses plus beaux atours, Franck se fait un point d’honneur de se lever avant le soleil. Dès 5h, le réveil sonne et il se met en marche pour aller à sa rencontre. «À l’aube, c’est magnifique, le moindre craquement de bois est amplifié.»

Il va utiliser chaque son pour remonter le cours d’une rivière, débusquer un point d’eau et tomber nez à nez avec l’animal, du chevreuil à l’orignal, du canard à l’outarde. «Je pratique la chasse fine, j’arpente le territoire, je marche beaucoup, je veux connaître les endroits où les bêtes vont boire, où elles vont se coucher. Mon style de chasse, ce n’est clairement pas de patienter dans une cache pendant sept heures, je n’y vois pas vraiment d’intérêt. Il faut que je sente le terrain, que ce soit l’aventure, une énigme à élucider.» Il peut tutoyer la forêt et les rivières, elles font partie de sa famille.

 


Frank est géographe de formation. Il a toujours une boussole en tête, un hygromètre au bout du nez. Mais si la chasse n’était que du calcul, il n’y passerait pas tant de temps. «Ce que j’aime, c’est l’imprévu, l’élément qui va tout changer», clame-t-il, de l’excitation dans la voix. Comme cette fois où, pendant le tournage de l’émission Hooké à la chasse, une tempête de neige sur l’île d’Anticosti a changé tous ses plans: «En quelques heures, il est tombé un pied et demi de neige. Tout ce qu’on pensait faire n’était plus possible, les conditions sont devenues extrêmes, mais ça a contribué à faire de cette journée une expérience de chasse exceptionnelle.» Le vent qui décide de tourner, la pluie qui cesse de tomber changent le sort de la sortie du chasseur. «Le moment où l’on sent que la journée prend une autre dimension, quand tout ce qu’on avait envisagé s’évapore…»

 

Une chasse éthique

Si Frank a accepté d’animer Hooké à la chasse, c’est aussi pour son goût du partage. La chasse peut être une expérience solitaire, un corps à corps avec l’environnement, mais elle est avant tout pour lui un travail d’équipe: «Quand j’avais 8 ans, je n’avais pas encore le droit de chasser, mais j’allais poser les collets avec mes oncles et mes cousins pour chasser le lièvre, ils me parlaient des techniques, des bons coins. Ma passion est née de ces moments-là, dès l’enfance. Je les aidais, ils m’apprenaient beaucoup, chacun apporte ce qu’il peut.» Toutes les histoires de chasse de ses oncles l’ont façonné. «C’est un répertoire d’anecdotes incroyables qui respirent toutes la liberté. Ils sortaient du quotidien, revenaient pleins d’histoires. Elles sont restées gravées dans ma mémoire. Ils ramenaient une bête attachée au toit de leur véhicule et toute la famille en profitait.»

Amateur de chasse à l’orignal, il a cependant un penchant tout particulier pour le petit gibier à plumes et plus particulièrement la sauvagine: les canards, cygnes, oies ou échassiers. «Le canard, si le vent vient du nord, si la marée est haute, si le plafond est bas, vous avez de bonnes chances d’arriver à le chasser. Mais ils sont très intelligents, pas faciles à déjouer, c’est tout un défi.» Il milite pour une chasse éthique: «Si je suis chasseur, c’est avant tout pour la relation que je noue avec la nature mais aussi pour me nourrir, pour avoir accès à une viande de qualité supérieure.»

Retisser un lien avec la nature

Chasser sur un territoire, avant de le connaître dans ses moindres recoins, c’est aussi l’explorer, l’apprivoiser, le séduire. Il faut se laisser initier à ses rudiments, traduire la langue de ses reliefs, le chant de ses rivières. L’émission Hooké à la chasse, sur les ondes d’Unis TV, propose une initiation à cette expérience. Elle explore les territoires de chasse du Québec: de Charlevoix à Mégantic, de l’île d’Anticosti à celle d’Orléans, mais aussi jusqu’au sud de la Californie, à Pasadena.

Le savoir-faire en bandoulière, Franck veut que les spectateurs de l’émission Hooké profitent de ses secrets. Qu’ils lèvent plus souvent la tête en entendant les outardes passer au-dessus de leur maison, qu’ils retissent un lien avec la nature distendu avec le temps. «Les Québécois ont toujours chassé, c’est une activité traditionnelle de notre territoire.» Il déplore un savoir qui se perd et une pratique décriée à tort, selon lui: «Je pense que la chasse a trop souvent mauvaise presse, que les émissions de télévision ne la réduisent trop souvent qu’à un sport de gens qui aiment juste appuyer sur la gâchette. C’est tout le contraire, il faut surtout observer, comprendre, et je prends autant de plaisir à laisser passer du gibier et à attendre que lors du face-à-face final avec l’animal.»

 Voyez la série Hooké à la chasse à la télé ou en ligne sur Unis.ca

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