Dany Bouchard s’est initié à la culture des légumes lors d’un voyage de woofing, un programme de volontariat, dans une ferme familiale d’Hawaï. Semis, désherbage, récolte : les tâches y étaient très variées. Ce court séjour a suffi pour provoquer chez lui une étincelle.
« J’ai eu la piqûre automatiquement. C’était la première fois de ma vie que j’étais en mesure de faire quelque chose où je travaillais intellectuellement et physiquement en même temps à l’extérieur, avec des gens avec qui je partageais beaucoup de valeurs », raconte-t-il.
« J’adore manger des légumes ! Mon alimentation est principalement composée de végétaux, donc retourner à la source m’a permis de connaître une abondance de légumes que je ne connaissais pas. Ça a été un coup de foudre. »
À son retour au Québec, le maraîcher en herbe se greffe à l’équipe de la Ferme des Quatre-Temps, afin d’approfondir ses connaissances. Ces trois belles années — qui lui donnent toujours le sourire aux lèvres — ont aussi nourri son questionnement intérieur : « je me demandais comment est-ce que je pouvais faire mon petit bout de chemin pour faire une différence dans le monde ».
Depuis, Dany Bouchard transmet ses connaissances au grand public, notamment dans la série C’est plus qu’un jardin sur Unis TV, où il prodigue de judicieux conseils à Emmanuel Bilodeau, à Édith Cochrane et à leurs enfants, afin qu’ils puissent faire pousser leurs propres légumes, même en zone ombragée.
Toujours dans le cadre de l’émission, il accompagne la famille Luca-Bédard dans la création d’un potager familial à leur domicile, en banlieue, près de Beloeil. « L’aventure démontre que c’est possible de cultiver la terre, même si tu habites en banlieue et seulement avec un carré de gazon que tu tonds autrement à chaque semaine », explique-t-il.
Le chemin atypique que Dany Bouchard a emprunté montre que ces connaissances sont en fait accessibles à tous. Après des études en administration, il a appris une grande partie de son savoir-faire sur le terrain. « C’est possible pour tout le monde de se réapproprier ce savoir. En fait, c’est beaucoup de gros bons sens, des conseils faciles à appliquer ; c’est possible pour tout le monde d’apprendre le tout », assure-t-il.
S’initier à l’autosuffisance représente également un retour vers ses racines. « Mon grand-père cultivait l’été et bûchait l’hiver, raconte-t-il ; c’était un savoir qui se transmettait de génération en génération, car le jardin n’était pas seulement une activité, mais bien une nécessité. »
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Notre relative sécurité alimentaire ne veut toutefois pas dire que ce métier est de moindre importance : « le travail de la terre nous reconnecte à quelque chose de profond. Il offre une occasion de se fortifier en sachant comment se nourrir. C’est beau et c’est universel, et j’ai envie que le plus de personnes possible aient accès à cette activité. »
L’académie potagère
Prêchant par l’exemple, Dany Bouchard cultive son propre potager avec sa conjointe, Cynthia, dans un petit village situé près de Sherbrooke. Avec elle et un autre associé, il a cofondé l’Académie potagère, un projet visant à redonner au jardin potager sa vocation nourricière. « Nous enseignons comment on peut arriver à se nourrir grâce à un potager, peu importe la quantité de nourriture. Que ce soit une pomme de laitue ou trois branches de kale, la symbolique est bien présente. »
À travers les liens créés à l’Académie potagère, Dany Bouchard espère voir plus de rassemblements et de colloques entre jardiniers de tous les horizons. « Plusieurs personnes qui font des jardins potagers ne connaissent pas nécessairement des personnes avec les mêmes intérêts ; donc j’ai envie de rassembler ces gens-là, de créer des espaces d’échanges et de célébrations. »
Se doter d’un jardin nourricier offre aussi l’occasion de comprendre la vraie valeur des aliments, au-delà du prix à l’étalage. Pour Dany, le brocoli, par exemple, est un légume de luxe, parce que le cultiver prend beaucoup plus de temps et d’énergie que de la laitue. « Quand je mange du brocoli, je me sens comme un roi. C’est comme du caviar! », s’exclame le maraîcher.
Dans son grand jardin, il migre de plus en plus de la culture commerciale vers l’aspect éducatif de sa mission. Pour leur consommation personnelle, lui et sa conjointe s’adonnent au cannage, à la transformation et à la déshydratation de leurs récoltes. « Si on cherche à atteindre une autonomie alimentaire, il faut prioriser des variétés de légumes éprouvées », conseille-t-il. Il prévoit notamment que 80 % de ses tomates seront d’une variété habituelle et que 20 % d’entre elles seront nouvelles.
À quelqu’un qui hésite à se lancer, Dany Bouchard conseille de commencer petit, avec une poignée de plants, un coin de potager. « Il faut voir le jardinage comme quelque chose qui s’apprend sur plusieurs années, donc il faut s’armer de patience. » Il propose aussi d’emprunter des livres et de suivre une formation sur la science derrière les plantes potagères.
La construction d’un potager offre aussi un laboratoire de cultures que le maraîchage commercial ne permet pas nécessairement. « Avec un potager à la maison, on est libre de choisir exactement quels légumes on veut manger », juge-t-il. Il évoque la flexibilité, le plaisir et la candeur qu’on peut insuffler au processus.
Renouer avec la nature, pour mieux la protéger
La culture potagère représente également une chance inouïe de renouer avec la nature. « Le potager est un endroit où l’on cultive des plantes annuelles donc, en une année, on voit la naissance, la croissance, l’arrivée des fruits, la maladie et la mort. » Cette compréhension sensible du fonctionnement du monde naturel donne au maraîcher une nouvelle perspective sur les écosystèmes plus lents comme les forêts. En marchant dans la nature, il construit des ponts entre la vie des légumes et celle des arbres.
« Le simple fait d’avoir un plant de basilic sur son balcon peut devenir une porte d’entrée vers l’ensemble du monde naturel. Quand on devient curieux de celui-ci et qu’on le voit sous un autre œil, les chances qu’on veuille le faire perdurer augmentent », réfléchit l’agriculteur.
Pour l’avenir, Dany Bouchard continuera de plonger les mains dans la terre pour faire de sa vision une réalité : contribuer à ce qu’il y ait un jardin dans chaque cour, à tel point que les jardins potagers deviennent la nouvelle norme.
C’est plus qu’un jardin est diffusé sur Unis TV le jeudi à 20 h et en ligne tout de suite après.