C’est en partie ce qui explique l’accueil enthousiaste que réserve Val-d’Or pour cette salle multifonction à l’âme résolument communautaire, qui n’a pas encore complété sa première rotation autour du soleil.
« Papaquoi ? »
C’est PapaChat & Filles, un organisme sans but lucratif se spécialisant dans l’organisation d’événements culturels, qui est l’instigateur du projet. Ce n’était pas dans les plans de l’équipe, qui s’est formée en août 2016, d’acquérir une salle de spectacle et d’y regrouper ses activités. Mais à force de créer des événements dans des lieux atypiques de Val-d’Or et d’en assumer chaque fois tous les défis techniques et logistiques, les fondateurs ont eu l’idée de concentrer leurs efforts dans un même lieu. Le local de la 3e Avenue, devenu vacant, représentait donc une opportunité trop alléchante pour la laisser passer – ils ont ainsi repris le bail en début d’année 2019.
Parallèlement, une campagne de sociofinancement a été mise sur pied afin d’impliquer la communauté et de palper l’intérêt, qui n’a pas tardé à se manifester. C’est près de 9000 $ qui ont été amassés auprès d’une centaine de contributeurs motivés, alors que le projet en était à ses balbutiements. Fort de cet appui, PapaChat & Filles s’est attelé à approcher des partenaires pour rassembler le plus d’acteurs communautaires et culturels possible. Le but : en faire un lieu porteur, où tout le monde se sent bienvenu.
Tisser des liens entre les communautés
Déjà, alors que l’ouverture officielle n’est pas encore annoncée et qu’une quinzaine d’événements ont été tenus, on sent que l’inclusion agit comme ligne directrice. « Depuis le départ, on voulait créer une synergie avec ce projet-là, résume Mélissa Drainville, cofondatrice de PapaChat & Filles. Quelque chose comme une maison des jeunes pour adultes le fun. »
La programmation, en développement, se façonne dans cet état d’esprit. Si les soirées quiz et l’improvisation ont déjà trouvé leur créneau à La Cabane, l’équipe proposera notamment dès cet automne un cabaret littéraire, afin de mettre en lumière cette scène, discrète à Val-d’Or, en dehors du Salon du livre de l’Abitibi-Témiscamingue. « En tant qu’OSBL, on va pouvoir accueillir des trucs plus underground qui n’ont pas nécessairement leur place ailleurs », souligne-t-elle. « C’était une nécessité d’avoir un lieu que les gens puissent s’approprier, un lieu communautaire et culturel. »
La Cabane a jusqu’à maintenant reçu deux enregistrements de baladodiffusion devant public – celle de Fred Savard, un habitué de la région, et la production locale Quand pensez-vous ? –, des spectacles du Festival de la relève indépendante musicale en Abitibi-Témiscamingue (le FRIMAT, qui en était à sa 15e édition cet été, et dont Mélissa Drainville a longtemps été la directrice générale), des soirées du Festival de l’humour de Val-d’Or, un lancement de livre, des partys d’anniversaire, et une soirée de drag queens. Il n’y a pas à dire, l’offre est variée et la clientèle aussi !
Force de frappe bénévole
Pour le moment, la salle est gérée de manière exclusivement bénévole. Les profits proviennent principalement de la vente d’alcool, notamment la bière du Prospecteur – microbrasserie locale ayant elle aussi pignon sur la 3e Avenue –, et des locations de l’espace.
La Cabane est vaste, et même en n’y ayant jamais mis les pieds auparavant, on se sent en terrain connu, à l’aise. La décoration et l’aménagement, réalisés à coup d’huile de bras, de beaucoup d’amour, de matériaux récupérés et d’ingéniosité, n’y sont pas étrangers. Le souci du détail et de l’inclusion se rend même jusqu’aux toilettes, mixtes, dont chaque cabinet incarne une thématique particulière. Signe que l’humour décalé est le bienvenu en ce lieu, l’une des récompenses de la campagne de sociofinancement incluait d’ajouter la photo des donateurs au mur de la cabine « Jésus t’aime ».
Si le local n’est ouvert que lors d’événements spéciaux, cela pourrait changer au fur et à mesure que des partenaires se joindront au projet et occuperont une partie des locaux, selon leurs besoins et leur offre de services. L’ajout de l’entreprise de jeux d’évasion ÉvasionAT au projet devrait multiplier les heures d’ouverture, puisque celle-ci compte exploiter dès la fin de l’automne un café-bar ludique et donner des ateliers de mixologie, en plus de proposer sur place deux jeux d’évasion.
Parmi les autres partenaires, on note la présence de l’organisme Jeunes musiciens du monde, qui offrira des cours de musique aux adolescents.
Aussi, au sous-sol, un dédale labyrinthique propice à la création de locaux de répétition. L’équipe souhaiterait par ailleurs aménager davantage ces locaux afin de soutenir les musiciens de coin et encourager la relève.
La Cabane ouverte aux mineurs
L’un des aspects distinctifs de La Cabane est qu’elle est accessible à un public de tous âges. Les événements et les spectacles qui s’y tiennent peuvent donc accueillir les jeunes et les familles, un avantage non négligeable que l’équipe compte mettre en valeur dans sa programmation.
Car s’il y a quelques années il n’était pas nécessairement inscrit dans la culture valdorienne de fréquenter les spectacles en compagnie de ses enfants, c’est devenu chose commune de voir des bambins se trémousser sur la musique et des nourrissons (dont le casque antibruit rivalise en volume avec leur tête), confortablement blottis dans un porte-bébé pendant que les parents profitent du moment. Mélissa Drainville est d’avis que les organisateurs du FRIMAT, dont elle faisait partie jusqu’à la plus récente édition, ont contribué à normaliser cette habitude en traînant leur propre marmaille dans les événements musicaux.
Les installations actuelles et la vocation communautaire de l’endroit permettent de faciliter cette tendance et de multiplier les points de contact entre la culture et la relève. Et si cette jeunesse, une fois devenue adulte, continue de fréquenter des spectacles et de mettre l’épaule à la roue pour contribuer à faire de Val-d’Or un milieu stimulant, ce sera mission accomplie pour La Cabane et PapaChat & Filles.