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Voici une autre bonne raison de prendre la route pour aller visiter l’étonnante région du Témiscamingue : le dernier né des parcs nationaux du Québec, qui attire déjà les visiteurs et pourrait bien servir de camp de base à ceux qui souhaitent découvrir les rangs et les villages de ce coin de pays qui demeure un secret bien gardé. Et on les comprend : on y trouve des trésors.

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Opémican. À lui seul, le mot invite à l’aventure et à la rencontre. Selon la Commission de toponymie, en langue algonquine, il signifie « à côté du chemin suivi par les Indiens ». C’est aussi sur la pointe portant ce nom, qui s’avance à la limite sud du lac Témiscamingue, que se trouvent des bâtiments qui sont parmi les plus anciens de la région, l’auberge Jodoin, un camp de drave et un chantier naval, notamment. Le lieu invite à une pause, comme on débarque à un port pour explorer les environs.

C’est ce site et le vaste territoire qui l’entoure qu’on a souhaité protéger en inaugurant, en 2019, le parc national d’Opémican, grâce auquel on peut entrer en contact avec ce patrimoine archéologique et naturel. Là où l’on se donne rendez-vous depuis la nuit des temps, on trouve désormais des sentiers, des campeurs, des familles à vélo et des baigneurs sur la plage. Il y a une certaine frénésie dans l’air, car si l’on peut déjà s’y délier les jambes et prendre un bol d’air, on y trouve aussi une équipe qui s’affaire à restaurer et à aménager ce site culturel et naturel étonnant.

Ambroise Lycke, le directeur du parc, un gaillard à l’énergie contagieuse, pilote les opérations ainsi que celles du parc Aiguebelle, plus au nord, près de Rouyn-Noranda. On s’en doute un peu : aménager un site qu’on souhaite protéger est un travail de précision.

« À la Sépaq, notre mandat est de protéger, mais aussi de faire découvrir cet endroit aux gens. Il faut créer des campings, des sentiers, des infrastructures. Il faut accueillir notre monde. On est un peu comme un éléphant dans un magasin de porcelaine : peu importe où l’on met le pied, il faut s’assurer de le mettre là où il y aura un minimum d’impact. Quand on a fait les aménagements pour le camping, on était dans une zone avec de gros pins. On n’a pas eu le choix d’en couper certains, mais on les a choisis un par un. On a placé nos terrains pour limiter l’abattage de gros arbres, afin de maintenir l’ambiance qu’ils créent. C’est tellement beau ! »

Passion, amour et confidences

Biologiste de formation, il a trouvé tout un laboratoire au parc national d’Opémican où conjuguer ces deux valeurs essentielles que sont l’accès au territoire et sa préservation. Avec un certain succès d’ailleurs, car même si le site est en constante évolution, les sentiers qu’on peut déjà parcourir et les plans d’eau sur lesquels on navigue tranquillement mènent à des paysages à couper le souffle, pour le plus grand plaisir des visiteurs de plus en plus nombreux au Témiscamingue, une région méconnue et pourtant tellement attrayante.

« Le Témiscamingue, je l’appelle ma petite perle du Québec, dit le directeur avec un grand sourire. C’est un lieu peu connu, avec une identité propre associée à ses forêts, à son côté agricole, dans le secteur de Ville-Marie, et à toute une histoire forestière. Je ne suis pas natif du “Témis”, mais ça fait 15 ans que j’y habite. Je l’ai découvert et, pour être franc, je trouve que c’est vraiment un beau spot du Québec, qui a avantage à être mis en valeur. »

On le croit volontiers, d’autant plus qu’il nous révèle sa passion pour le canot-camping et les expéditions en forêt tout en nous expliquant que certains secteurs du parc, comme l’archipel de l’île aux Fraises, sur le lac Kipawa, ne sont accessibles que par voie nautique. Quelques courtes promenades suffisent toutefois à prendre la mesure du panorama, notamment une balade sur le sentier de la Grande-Chute ou une randonnée sur celui de l’Inukshuk aboutissant à un point de vue renversant sur le lac Témiscamingue. C’est en contemplant cette immense étendue d’eau qu’on prend conscience que ce coin de pays reste, en bonne partie, à découvrir. Frontière naturelle avec l’Ontario, le lac, long de 110 kilomètres, est en quelque sorte le berceau de la région. Ainsi, le parc sert de mise en bouche, de porte d’entrée pour partir à la rencontre des rangs et des villages qui jalonnent le territoire.

Un sentier à travers les pins

Un vieux dicton veut que qui prend mari prend pays. Dans le cas d’Ambroise, il faudrait le dire autrement, car c’est en rendant visite à la famille de sa copine, originaire du coin, que le gars de la rive sud de Montréal a pris goût au Témiscamingue. Au point de s’y installer, d’y acheter une ferme et se consacrer à la préservation de ses richesses naturelles. Aujourd’hui, personne n’en doute, il a le « Témis » gravé sur le cœur, et il en parle avec amour.

« Il y a dans la région des producteurs biologiques, une belle agriculture foisonnante. Je pense aussi à la foire gourmande de Ville-Marie, qui est de plus en plus connue et qui grossit chaque année, tout en demeurant un événement accessible. Le côté “petit village”, avec du monde bien sympathique, c’est quelque chose qui me rejoint beaucoup ; plus que chacun dans sa bulle dans le métro, comme ça l’était dans mes années à travailler à Montréal. Quand je vais dans un magasin ici, je parle avec les gens. Ma perception est peut-être biaisée, mais j’aime bien le Témiscamingue. » 

Sentier de l’Inukshuk

À l’écouter parler et à visiter le parc dont il prend soin dans les moindres détails, on se prend au jeu et on en vient à penser qu’Ambroise Lycke a trouvé ici une vie de rêve pour un biologiste explorateur. On se découvre même l’envie d’aller vivre dans le coin, histoire d’y revenir tous les jours pour faire un plongeon dans le lac ou une promenade de santé. En attendant, il y a quelque chose d’émouvant à remonter la rivière des Outaouais jusqu’à cette pointe Opémican où, comme depuis des siècles, il fait bon accoster afin de partir à l’aventure. Voilà un voyage qu’on refera souvent, comme ceux qui, avant nous, sont passés par ici.

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