La salle de dégustation s’est faite moderne, avec son allure industrielle. Pourtant, tout ce qui compose la distillerie-brasserie Menaud est rempli de chaleur. Sur place, l’ambiance est détendue et les propriétaires sont chaleureux et enjoués. Derrière le bar, on retrouve les magnifiques bouteilles de gin et de vodka au design soigné qui, dans les deux dernières années, ont fait la renommée de Menaud auprès des amateurs de spiritueux. Les visiteurs viennent nombreux dans ce quartier industriel de Clermont, à proximité de La Malbaie, pour se procurer ces produits prisés.
La genèse de l’entreprise est résumée ainsi par ses fondateurs : le nom est un clin d’œil au roman Menaud, maître-draveur, écrit dans Charlevoix, et la brasserie s’en inspire en célébrant sa région avec des produits artisanaux et locaux créés avec la philosophie « du grain à la bouteille ». L’équipe produit fièrement son alcool local à 95 %, en collaborant avec divers producteurs voisins et en faisant pousser son propre houblon à la brasserie.
« À l’image du personnage de Menaud, on est des artisans, explique Enrico Bouchard, l’un des fondateurs. On est des maîtres-brasseurs, des maîtres-distillateurs. Menaud, dans l’histoire du livre, défendait grandement la région contre les enquêteurs. Nous, on utilise tout ce que Menaud a défendu. On utilise tout de la région, jusqu’à ses terres agricoles qui ont été protégées. On cherchait un nom qui reflétait notre identité charlevoisienne. »
Ce sont cinq amis et associés qui ont mené à terme cette vision d’une distillerie et d’une brasserie sous un même toit : Martin Brisson, un sculpteur qui a pris en charge la distillation ; Enrico Bouchard, un ingénieur qui a conçu les plans ; Charles Boissonneau, le responsable de la superbe image de marque ; ainsi que Grégoire Bluteau et Gilles Brouard. Une chose était claire : les gens devaient s’y sentir bien accueillis.
« Au départ, on voulait un endroit où on pouvait faire visiter les installations, explique Martin. Le salon de dégustation offre une vue sur les alambics ; c’est de toute beauté ! Alors les gens voient le bel équipement, peuvent faire une visite guidée et boire leur bière à l’extérieur, sur notre terrasse. » En sirotant la rafraîchissante Amarillo aux notes de mangue ou la Persil concoctée à partir de plantes de L’Isle-aux-Coudres, on peut admirer les plants de houblon grandissants.
Si c’est du whisky que le groupe avait envie de produire au départ (ça viendra, promet-on, dans quelques années), c’est vers la vodka, le gin et la bière que Menaud s’est tourné. Des boissons qui ont une qualité bien douce en commun : le souci et la fierté d’être ancrés dans leur terre natale.
Bien de chez nous
« L’esprit de départ est d’utiliser un maximum de produits du terroir dans nos concoctions, confie Martin Brisson. Pour développer les spiritueux, on a pris une entente avec la famille Harvey de L’Isle-aux-Coudres. Ce sont les champs qui sont labourés par Louis dans le film de Pierre Perreault, Pour la suite du monde, et qui appartiennent désormais à ses petits-fils. On y fait pousser notre blé, notre seigle et notre orge. »
C’est l’eau salée et le sol calcaire (provenant d’une météorite !) propice à l’agriculture de L’Isle-aux-Coudres qui ont séduit le groupe aux idées avant-gardistes. « On se disait : “il va y avoir quelque chose de particulier dans ces céréales-là”, et ça s’est avéré exact. »
Souhaitant éviter de dénaturer ses céréales aux goûts spécifiques, l’équipe de Menaud a opté pour un mélange blé-seigle naturellement goûteux. C’est à partir de ces grains des champs qu’est produit l’alcool qui sera transformé en gin, en vodka (filtrée) et en liqueur.
Les mélanges, les recettes de bières, les spiritueux, tout ce qui est produit jouit d’inspirants apports de producteurs de Charlevoix devenus de fiers partenaires. Un enracinement à la terre charlevoisienne qui n’est pas nouveau.
« Ça a été très important, au début de ma carrière de sculpteur, et c’est toujours resté, ajoute l’artiste-brasseur. En sculpture, je travaille le bois et la pierre du Québec ; mon acier est récupéré des chantiers navals de Charlevoix. Dans Menaud, ç’a été le même procédé ; chacun de mes associés a cet esprit-là. On a développé un sentiment de fierté par rapport à ce qu’on fait et ce qu’on produit. »
Ce sentiment est partagé par les autres producteurs, agriculteurs et artisans de la région qui s’affichent maintenant et invitent davantage qu’avant les gens à leur rendre visite.
« Menaud, c’est un cheval fou qu’on essaie de tenir en bride pour le contrôler; mais c’est super stimulant, parce que ça marche et les gens apprécient, ajoute Martin. Alors on continue de développer des produits, à mettre en marché des boissons originales. On a de nouveaux spiritueux qui s’en viennent, du whisky, plusieurs projets de liqueurs, de l’absinthe et d’autres prêts-à-boire et des bières en développement. »