Après-ski houblonné

Dès les premières neiges, la population de Saint-Donat se multiplie grâce aux skieurs qui dévalent les nombreux monts à proximité. Et le village de 4000 habitants peut maintenant se vanter d’avoir sa propre microbrasserie artisanale: le Brouemalt, qui abreuve et nourrit les adeptes de l’après-ski – sportifs ou non.

«Presque aucun jour ne passe sans qu’on nous remercie d’avoir ouvert un brouepub à Saint-Donat», raconte Mathieu Gibeault, brasseur et copropriétaire du Brouemalt avec sa conjointe, la sommelière Fannie Bessette. Depuis sa fondation en septembre 2017, la petite entreprise – qui brasse aussi ses bières artisanales depuis le printemps dernier – connaît un succès retentissant, en hiver comme en été. Tant les résidents que les vacanciers se donnent maintenant rendez-vous, le midi ou en soirée, dans le bâtiment de la rue Principale qu’ils ont reconverti en joli pub de 60 places (+80 en terrasse) avec mini-atelier de brassage.

C’est justement sur la rue Principale de Saint-Donat, à quelques pas d’où ils ont désormais pignon sur rue, que l’histoire d’amour de Mathieu et Fannie est née, il y a huit ans. Originaires respectivement de Saint-Jean-sur-Richelieu et de Saint-Bruno, les deux avaient eu quelques années plus tôt un grand coup de cœur pour la qualité de vie qu’offrait ce petit coin de Lanaudière. Fannie travaillait dans un bar à vin local, et l’un de ses meilleurs clients était Mathieu, propriétaire d’un chalet dans les environs. Quelques années plus tard, ils construisaient ensemble une maison («Une bonne pratique!», selon elle) puis se lançaient dans l’aventure Brouemalt.

Mais bien avant d’unir leurs destinées, tous deux trouvaient qu’il manquait à Saint-Donat un établissement qui leur ressemble, où ils auraient eux-mêmes envie de prendre un bon verre (et, pourquoi pas, une délicieuse soupe à l’oignon). C’est exactement ce qu’ils ont fondé: un brouepub relax, chaleureux et sans prétention, pour se détendre et goûter à des bières brassées sur place ou créées par d’autres microbrasseurs québécois. «Les gens ne se retrouvaient pas nécessairement à Saint-Donat pour sortir après le ski: ils préféraient rentrer chez eux ou au chalet. Il n’y avait pas non plus d’endroit servant des bières de la région», explique Fannie.

Il était primordial que leur établissement ait une ambiance familiale et soit accessible aux enfants, y compris les leurs – Xavier, 10 ans, et Laurence, 6 ans –, aujourd’hui bien connus des clients. «Microbrasserie et famille, je trouve que ça va bien ensemble!», déclare Mathieu, dont le permis de producteur de bière artisanale permet aux mineurs de fréquenter le Brouemalt (d’ailleurs muni d’une salle avec jeux de société). «On n’est vraiment pas un lieu de beuverie: on est axés sur la dégustation, on ne sert pas de shooters, et on ferme à minuit. On laisse la suite aux autres…» renchérit l’ex-barmaid en riant.

Globe-trotters

La famille Gibeault-Bessette a toujours été mordue de voyages: depuis plusieurs années, elle part systématiquement deux fois par an. C’est justement lors d’un périple de plusieurs mois (en Inde, au Sri Lanka et en Malaisie) que Mathieu a eu l’idée de s’initier au brassage. Mais ne devient pas brasseur qui veut. Sitôt revenu au Québec, il a dû faire ses classes. Le jeune entrepreneur a appris auprès de plusieurs artisans de la région, surtout de Michaël Fiset du Malstrom (Notre-Dame-des-Prairies), un maître-brasseur à la passion contagieuse.

«Pour obtenir un permis artisanal, il faut absolument être coaché par un brasseur de calibre. Mike a été le meilleur prof! On s’est rapidement liés d’amitié et c’est lui qui m’a aidé à monter mon atelier de brassage. Au début, je l’appelais souvent à l’aide… Il a vraiment été super disponible.» C’est d’ailleurs au Malstrom que Mathieu a brassé sa toute première bière: l’Alfonso, une mango pale ale qui continue d’être l’une de ses plus populaires. Il a également tissé des liens avec les brasseries Mille-Îles (Terrebonne) et La Diable (Mont-Tremblant), toujours pour parfaire ses techniques.


Ce côté globe-trotter des propriétaires de la microbrasserie transparaît beaucoup sur la carte. Par ses mets internationaux qui sont proposés (Brouemalt est le seul établissement donatien à offrir à la fois des samosas, des bành mi, des satays, du chili et des taquitos), mais aussi les noms de ses bières, comme la Mendoza, l’El Puncho, la Helsinki… «Pour les baptiser, on fait presque toujours appel au staff, sauf pour la Rang double, nommée par Gilles Coutu, un de nos plus fidèles clients», dit Fannie, en expliquant qu’il s’agit de l’ancienne dénomination de leur rue Principale. (Et justement, par pur hasard durant notre visite, ce sympathique septuagénaire, issu de l’une des familles fondatrices du village, est passé déguster une bière au bar.)

Pale ale, IPA, rousse… Jusqu’à maintenant, Mathieu a créé une dizaine de bières et il a des idées à revendre. «À ce stade-ci, il est difficile de définir mon style de bière, mais de façon générale, je les aime équilibrées et généreuses, faites avec les meilleurs ingrédients. Je ne ferai jamais aucun sacrifice de ce côté! Je préfère aussi brasser des bières qui n’ont pas une grosse “carbonatation”. Elles pétillent, mais sans excès.» En plus des produits brassés sur place, les fûts du Brouemalt proposent une sélection québécoise variée (Malstrom, bien sûr, mais aussi Dunham, Memphré, les Brasseurs du temps…). Au menu alcool s’ajoutent des cocktails de base, ainsi qu’une solide carte des vins d’importation privée, que Fannie a concoctée avec soin pour ses clients qui ne sont pas de type bière.

Avec le grand succès que connaît déjà le jeune Brouemalt, faut-il envisager une expansion prochaine? «Non!», répondent Mathieu et Fannie, à l’unisson. «On préfère rester petits et peaufiner notre offre. Continuer de voyager avec les enfants, conserver la bonne ambiance qu’il y a chez nous», ajoute cette dernière. Le couple augmentera sa quantité de growlers, qui permettent par exemple d’apporter de la Brouemalt au chalet pour le week-end (la première batch s’étant écoulée en moins d’un mois!), et poursuivra son partenariat avec Ski Garceau (les détenteurs d’une passe ont droit à un galopin gratuit). Ils sont bien fiers d’être les premiers Donatiens à déneiger leurs deux terrasses au printemps et comptent bien refaire le party hivernal extérieur qui a beaucoup fait jaser l’an dernier.

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