Alors que les grandes villes du Québec se tournent tour à tour vers les magasins à grande surface situés dans des quartiers périphériques souvent peu accessibles, Saint-Hyacinthe a fait le pari d’investir une somme considérable dans son marché public pour préserver la vitalité économique d’une région qui se refait une beauté depuis quelques années. Ce lieu que tous considèrent comme un précieux bijou historique de la région maskoutaine est encore aujourd’hui le véritable poumon du centre-ville de la municipalité. Son apport en oxygène pour les différents commerces situés dans le bas de la ville est primordial, sans quoi ceux-ci auraient une durée de vie écourtée.
Construite en 1877, la structure vieillissante du bâtiment s’était toutefois essoufflée au fil des dernières années, elle qui avait eu sa dernière cure de rajeunissement il y a environ 35 ans. Inquiets de sa solidité, les conseillers municipaux n’ont eu d’autre choix que de se questionner sur la viabilité du bâtiment patrimonial. Ce n’est toutefois qu’en 2016 qu’une réflexion s’est amorcée pour les conseillers municipaux. Est-ce que le temps était venu de greffer un nouveau poumon ou simplement alimenter ce dernier d’une source nouvelle d’oxygène qui permettrait au quartier de respirer comme dans ses belles années?
Le conseil municipal était unanime, il fallait impérativement préserver ce joyau économique et patrimonial. Hors de question de tourner une page d’histoire pour le moment. Le conseil municipal a donc fait le choix d’investir une coquette somme qui dépasse les 7 millions de dollars pour quatre phases de construction qui permettront de donner une nouvelle vie au marché. Pour Claude Corbeil, maire de Saint-Hyacinthe depuis 2013, la préservation du patrimoine et la vitalité économique vont de pair: «Il va de soi que le marché public est le cœur de notre centre-ville de par son histoire, mais également de par son attrait touristique et économique. Sans aucun doute, les membres du conseil voulaient garder notre marché public, qui est synonyme de vitalité économique dans notre centre-ville.»
Issu d’une famille d’agriculteurs de plusieurs générations, celui qui agit à titre de grand manitou de la municipalité depuis maintenant cinq ans n’a que de bons souvenirs de jeunesse liés au monument qui a eu de nombreuses utilités pour la Ville: «On y allait l’été chercher des légumes et des fruits. L’Hôtel de Ville a déjà été installé au deuxième étage. Le palais de justice également il y a plusieurs années. Il a servi de salle communautaire pour les résidents du secteur. Maintenant, il y a le centre d’expression qui permet aux artistes de faire voir leur travail.»
Une offre sans égale
Malgré l’arrivée des supermarchés de grande surface dans la région maskoutaine, la clientèle n’a jamais été aussi fidèle depuis quelques années. Son emplacement demeure son atout le plus important selon les différents acteurs qui exploitent leurs entreprises à l’intérieur ou même à proximité du marché qui a fêté ses 140 ans l’an dernier. «C’est assurément le cœur du centre-ville. Sans le marché public situé à cet endroit, les petits commerces autour n’auraient pas le même succès sans l’ombre d’un doute», a fait valoir une employée d’un commerce ouvert depuis près de 20 ans près du marché public.
Pour leur part, les commerçants locataires qui sont installés à l’intérieur de l’édifice centenaire sont heureux de la décision prise par la Ville. D’ailleurs, les dernières années ont été fastes malgré les travaux de construction qui paralysent certaines activités à l’extérieur du bâtiment. «Les ajouts auront sûrement un effet positif. Il y aura l’ajout d’un nouveau stationnement pas très loin, ce qui était un enjeu majeur depuis plusieurs années. Ça va permettre aux gens de pouvoir facilement venir nous rendre visite», a fait remarquer Michel Charron, propriétaire de la Boucherie Charron qui est installée au cœur du marché depuis 51 ans maintenant.
Pour sa part, Mélanie Tétreault, copropriétaire de la Poissonnerie Charron, estime que le marché public offre une ambiance qui ne se retrouve nulle part ailleurs dans les supermarchés. «Il y a des gens qui viennent ici depuis des années. C’est un endroit où il y a une expertise et des produits frais de qualité supérieure. Je reçois chaque jour environ six à sept livraisons de poissons et fruits de mer, ça fait une grande différence auprès de notre clientèle», a-t-elle assuré en mentionnant que son chiffre d’affaires a connu une croissance intéressante depuis 2001.
Le marché de tous
Rares sont les endroits qui peuvent se vanter d’attirer des foules aussi diversifiées que celles qui se présentent chaque semaine au marché public maskoutain. Employé à la boulangerie depuis près de trois ans, Simon Drapeau estime que la diversité de sa clientèle est vraiment impressionnante. «Il y a les gens d’affaires des banques, les aînés, des collégiens qui étudient au cégep, des familles, des gens issus de minorités ethniques, des gens dans une situation financière plus difficile. J’ai rarement vu un endroit qui réunit autant toute la communauté d’une ville», a-t-il avoué.
Depuis quelques années, la Ville a même profité de l’esplanade qui borde le marché public pour présenter des spectacles de différents groupes des communautés ethniques de la municipalité chaque dimanche et offrir des dégustations. Une initiative qui permet aux Maskoutains de s’ouvrir sur le monde dans un endroit qui représente une page d’histoire importante de la région.