La clé des champs

Nous sommes de plus en plus préoccupés par ce qui se passe dans notre assiette. La Ferme Vallée verte répond à cette inquiétude avec ses produits 100% naturels et qui offrent ce goût d’hier que tant recherchent aujourd’hui.

Il y a des saveurs qui ressemblent aux lieux qui les ont vues naître. Des aliments dont le goût, l’aspect, l’histoire rappellent immanquablement les paysages qui leur servent d’écrin. Les cheddars et les yogourts de la Ferme Vallée verte sont de ceux-là. Il faut se rendre sur les lieux, au creux d’un des vallons qui jouxtent Saint-Jean-de-Matha, quelque part à droite du rang Guillaume-Tell, pour mettre les mots adéquats sur l’authenticité des produits de David et Samuel Gadoury. On trouve, au milieu de ce Lanaudière bucolique, dans la douceur de ces collines roulantes parsemées de petites exploitations, quelque chose de franc, de simple, qui nous évoque un Québec de cocagne, un Québec éternel. Un Québec dont la Ferme Vallée verte nous propose en quelque sorte de retrouver le goût.

Mais n’allez pas croire que ce Québec-là est figé. Au contraire: il change avec son époque. Une époque de plus en plus préoccupée par ce qui se passe dans son assiette. «Depuis sa construction en 2013, notre fromagerie fonctionne sur la base d’une agriculture durable, avec des bêtes nourries sainement et élevées sans OGM», raconte David Gadoury, l’aîné des deux frères. «En se débarrassant de tout ça, on a constaté que l’espérance de vie de nos vaches augmentait considérablement! À court terme, l’agriculture moderne permet d’améliorer les rendements, mais à long terme…» Sachant qu’il faut patienter deux ans avant qu’une vache laitière donne du lait et que lui apprendre à utiliser la trayeuse prend du temps, allonger son espérance de vie grâce à une alimentation saine n’est pas un si mauvais calcul financier. Et ne parlons même pas du calcul éthique: ses gains sont incommensurables.

Ici, pas de traite forcée: quand elles en ressentent le besoin, les vaches quittent simplement leur large box et leur petite plage de sable pour se diriger vers le robot à traire. Elles disposent aussi d’une brosse sur laquelle elles peuvent se frotter quand bon leur semble. Quand les beaux jours reviennent, les murs de la ferme s’ouvrent très largement pour laisser entrer l’air, la lumière et les regards des visiteurs venus s’approvisionner sur place. «En comptant les bébés, nous avons 150 têtes de bétail, poursuit David. Mais seules 60 à 65 sont utilisées en même temps. Les autres sont soit trop jeunes, soit au repos pendant deux mois en rotation.» Tout ici est, on le sent bien, pensé pour le bien-être des animaux et une certaine éthique agricole. Évidemment, la qualité des produits s’en ressent…

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La clé du local

«Notre alimentation est à la base de notre santé», insiste David en prenant des accents presque militants. «Il ne faut pas chercher bien loin les raisons des problèmes actuels de maladies et d’allergies: ils sont souvent causés par ce que nous mangeons. Quand on disait ça il y a 25 ans, on passait pour un hippie, mais plus aujourd’hui.» Le cahier des charges de la Ferme Vallée verte répond scrupuleusement à ces convictions: pas d’hormones, pas d’antibiotiques, pas de pesticides, pas de colorant, pas d’arômes artificiels, pas de conservateurs. Juste les produits les plus naturels, les moins transformés possible. Malgré tout, aucune certification bio n’orne les emballages. Surprenant? «Notre lait a eu l’homologation Ecocert pendant 10 ans, mais nous l’avons abandonnée lorsque nous avons lancé la fromagerie: c’était trop de paperasse et trop de dépenses. Et puis le bio est aujourd’hui tellement demandé qu’il en est parfois devenu industriel à son tour…» S’ils ne rejettent pas l’idée de retrouver cette homologation un jour, il est très clair que ce n’est pas une priorité pour les frères Gadoury. L’essentiel à leurs yeux reste le circuit court, l’agriculture durable, «l’amour de la terre et des animaux», comme ils le proclament dans leur brochure. «La production locale, c’est ce qu’il y a de mieux, nous confirme David. Pour les consommateurs, mais aussi pour l’emploi dans les régions, il faut conserver des fermes à taille humaine.»

Locale et à taille humaine, la Ferme Vallée verte l’est assurément. De la nourriture des vaches à la mise en pots des yogourts, en passant par la pasteurisation du lait et la confection du cheddar, tout est fait sur place par la dizaine d’employés de la ferme et de la fromagerie. À l’occasion, les frères Gadoury en profitent même pour mettre en valeur le travail des petites exploitations alentour. Pour faire leur cheddar au bacon, ils se sont par exemple approvisionnés dans une ferme d’élevage d’un rang voisin. Même chose pour le chocolat et les framboises qui sont ajoutés à certains de leurs yogourts. «On essaie de s’entraider, résume David. On est preneur de toutes bonnes idées d’association avec nos produits laitiers. Nos cheddars au bacon et à la bière sont de bons exemples de ces expérimentations.»

Bon lait ne saurait mentir

De la ribambelle de fromages et de yogourts qui s’alignent dans les réfrigérateurs de la boutique, lesquels se vendent le mieux dans les 180 magasins qui les reçoivent? Côté fromages, nous dit-on, les cheddars nature et à la ciboulette sont indémodables et caracolent en tête. Quant aux yogourts, si Montréal est, paraît-il, très demandeuse des versions nature et à la vanille, ce sont les versions sucre d’érable et framboises qui seraient les plus prisées en boutique et aux alentours.

Mais la plus belle des expériences gustatives reste selon nous de prendre une grande rasade de matière première: le lait. La Ferme Vallée verte vend le sien à 3,8% de matière grasse, pasteurisé à basse température et surtout non homogénéisé: si vous le laissez reposer, une grosse couche de crème va venir se former en surface. Incomparable avec celui de ses cousins industriels, son goût riche est un vrai voyage dans le temps, une madeleine de Proust liquide. J’y ai retrouvé un peu de la saveur de mes huit ans, quand je descendais à la ferme pour flatter les veaux et goûter le lait fraîchement sorti du pis. Moi qui pensais cette saveur du passé perdue à jamais, j’ai enfin retrouvé la clé des champs: elle était dans les collines roulantes de Lanaudière, quelque part à droite du rang Guillaume-Tell…

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